750- En route pour Bordeaux, Vladimir Poutine s’est arrêté dans l’abbaye de Maurice Druon, de l’Académie française. Ils sont amis, ils parlent chevaux et poésie. Tout va bien, pas le moindre terroriste tchétchène à l’horizon. Le successeur de Pierre le Grand est ensuite reçu au château Cheval-Blanc, cru mythique de Saint Émilion, racheté en 1998 par le financier belge Albert Frère et le P-DG du leader mondial du luxe LVMH, Bernard Arnault. Juppé est de la partie, c’est un sacre.


Bien qu’il ait déclaré sans ménagement préférer un verre de vodka avec cornichon au vin local (un ange passe), le nouveau tsar se voit offrir un splendide cadeau une caisse de vins de différents millésimes, en fonction des dates qui ont compté pour lui. 1952 : sa naissance. 1983 son mariage. 1985 et 1986 : la naissance de ses filles. Et enfin 2000 : l’année de son arrivée au Kremlin. Bien entendu, pas la moindre bouteille pour marquer son entrée, jadis, au KGB. Les Bordelais savent tenir, c’est une tradition anglaise.


Mme Poutine, elle, a assisté à un défilé privé chez Chanel. Une journaliste écrit : « Blonde et ronde, le regard bleu, aimable et impénétrable, ne demandant qu’à sourire mais ne souriant pas, dotée d’une interprète alors qu’elle parle français couramment, Ludmila découvrit chez Chanel les vertiges d’une planète inconnue. C’était la première fois qu’elle visitait une maison de couture, qu’elle voyait défiler une collection. Des fourreaux noirs sous canotiers de poupée, des robes du soir crépitant de broderies pâles sur des transparences incertaines. » La tsarine, émue, est quand même restée perplexe devant les minijupes : « J’aime beaucoup, mais je ne peux pas m’imaginer les porter. » C’est en effet préférable.
Au fait, majesté, allez-vous vous opposer par un veto à l’arrogance américaine ? Ce n’est pas impossible, les négociations sont en cours. (23/02/2003)

[LITTÉRATURE ET POLITIQUE. Éditions Flammarion, 2014.]